Cameroun, visite de la chefferie de Bandjoun

14 octobre 2013

Cameroun, visite de la chefferie de Bandjoun

A 20 km de Bafoussam, sur la route de Bagangté, se trouve la chefferie de Bandjoun, la plus belle du pays Bamiléké. Des chemins sinueux, bordés de clôtures enfermant des bananiers, mènent à une succession de cases traditionnelles, bien alignées et soutenues par des piliers de bois sculpté, sorte de colonnades autour de l’habitat qui mérite d’être détaillée.
Les façades sont faites de bambous patiemment liés avec des fibres végétales; certaines sont ornées de motifs géométriques. Les portes, encadrées de panneaux sculptés, sont surélevées à 50 cm du sol pour que les eaux d’écoulement et les animaux ne les franchissent pas. L’ensemble est surmonté d’un lourd toit conique suffisamment épais pour ne pas laisser filtrer les gouttes de pluie.
L’extérieur de la case tend à changer de plus en plus, malgré la volonté de certains notables Bamilékés qui essayent de conserver l’ancienne architecture locale. Le toit de chaume est remplacé par un toit de tôle ondulée et les rideaux en bambou ne couvrent plus les façades. Par contre, l’intérieur des cases reste partout le même. Le foyer est au centre de la grande pièce; trois pierres suffisent à supporter les marmites. Tout le mobilier est en bambou; telle l’échelle pour grimper au grenier où est stockée la réserve de maïs, d’arachides et de bois, également les étagères pour ranger les ustensiles ménagers, les lits et même les tabourets.
La chefferie contient aussi un musée où l’on trouve les accessoires des anciens chefs, le patrimoine de la famille, mais aussi un grand bâtiment moderne qui sert de salle de fêtes, de salle de réunion..
La grande case mesure 17 m de haut et servait autrefois de résidence au chef. Elle fut construite par le roi NOTOUOM I il y a plus de quatre siècles environ. Depuis, elle est régulièrement restaurée. Sa partie supérieure est utilisée comme grenier à arachides et à maïs, à l’instar des autres cases. Elle est constituée de 3 couloirs et d’une salle de réunion décorées de peaux de lion, symbole du chef, de panthère, symbole des grands notables et des portes avec gravures de lézards, symbole des petits notables. Elle supportée par des piliers sculptés dont ceux du milieu sont les plus anciens, ayant résisté aux trois incendies qui ont eu lieu à la chefferie.
La structure de la chefferie ressemble à celle de la concession des notables. L’entrée principale mène à la grande case et les cases des femmes sont situées des deux côtés de la route. Les femmes d’un côté sont dirigées par la première épouse encore appelée « nkoung » et celles de l’autre par « Djuikam », la femme de son prédécesseur qu’il prend pendant l’initiation.
Les concessions initiatiques entourent la chefferie et sont dirigées par des notables très influents. Exemple des différentes concessions d’initiation du chef ou « Fam », la concession du bracelet royal et la concession de « Taptouom-Kwamou », l’un des deux initiateurs du « Todjom », remède initiatique que l’on administre à tous les bébés Bandjounais quel que soit le lieu où ils vivent.
La forêt de la chefferie est très importante. La partie située juste derrière la grande case comprend le « Fam » ou lieu d’enterrement du chef. Elle n’est foulée que par les initiés. Une autre forêt se trouve près de la place du marche de « Dzemto », et tout le long de la colline des étrangers « mghue ». C’est le lieu de repos des totems des initiés.
La chefferie est le centre de convergence des différentes provinces ou « Dje », qui sont des unités administratives traditionnelles avec chacune une spécificité. Les missionnaires Allemands par exemple étaient installés à « Djiomghue », juste après la rivière des étrangers. Le « Dje Njiomghue » est spécialisé dans la magie ou « nkou » dirigé par « Tatuene » et « Tatuebou ». Lutter contre les esprits maléfiques, annuler la pluie lors des cérémonies importantes, ou chasser l’esprit d’un initié décédé est leur domaine. Le « Dje Djesse » est spécialisé dans le « Dje » ou sacrifices pour bénir le chef et demander la pluie à Dieu. Quand il fait trop chaud, « DZudie Teyo » « Dzudie Tambou » et 5 autres font un tour à Baleng et leur retour est salué de la première pluie avant les semences.
Contrairement au chef qui est enterré par les initiés au « Fam », les épouses et les princes sont enterrés dans d’autres concessions hors de la chefferie.
Le chef

Il est appelé Fôn de Bandjoun par les étrangers. En patois, on l’appelle  » Fô a djo « , ce qui veut dire le Chef de Bandjoun.
Il est entouré par
le conseil des neuf notables, constitué de notables du premier degré. Les notables sont appelés Nkam. Ce sont eux qui assistent le chef dans toutes ses décisions législatives. La salle où a lieu le conseil est appelée le la’kam, c’est en quelque sorte une assemblée nationale. Presque la totalité des lois édictées par le chef est initiée par eux. Le conseil limite et tempère l’autorité du chef évitant par là les abus de pouvoir et glissement possible vers la dictature.
le conseil des sept notables, constitué de notables du second degré. Ce sont les agents d’administration du village: ils sont chargés de maintenir la paix, l’ordre et la sécurité interne.
les chefs de quartier qui sont à la tête d’un quartier du village et agissent chacun dans leur sphère de compétence
Le chef est à la fois
le détenteur du pouvoir magico-religieux, car il est considéré comme un être supérieur, ayant un pouvoir charismatique. Il est avant tout l’intermédiaire entre les morts et les vivants.
le détenteur du pouvoir économique. Il est l’unique propriétaire du territoire constituant son État. C’est lui qui donne le droit d’usage sur la terre, droit qui peut-être enlevé pour indignité. Par là, il est tout puissant puisque la terre est un bien indispensable. La terre ne se vend pas puisque c’est la propriété des dieux qui ne la donnent, à travers le chef, qu’en usage aux habitants de la chefferie.
le juge, l’arbitre : c’est lui qui nomme les membres du tribunal central qui, sous sa présidence, tranchent les différends et rendent les sentences sans appel sur les affaires qui lui sont transmises par les tribunaux de quartier. Il délègue aux chefs de quartier le pouvoir de juger les petites affaires, chacun dans le territoire qui relève de sa compétence.
Le détenteur du pouvoir politique et administratif: il découpe le territoire en quartiers et nomme à leur tête les chefs de quartier et leur délègue une partie de ses pouvoirs. La population lui paie en travail et en nature un impôt dont la périodicité et le montant ne sont pas fixés, mais dépendent des besoins du chef et de l’esprit de compétition des contribuables. Le chef est assisté dans son gouvernement par certaines personnalités influentes de la société regroupées au sein de sociétés secrètes coutumières.
Les femmes du chef

La famille du chef est très nombreuse.
L’un des grands Chefs de Bandjoun, Kamga II, avait plusieurs dizaines de femmes et presque 250 enfants. Depuis sa mort en 1975, sa succession a été assurée tour à tour par ses fils :
Fotue Kamga (technicien d’agriculture à qui on doit la construction du musée et du palais moderne) : il est mort tragiquement d’un accident de voiture loin de son royaume, après avoir pris une trentaine de jeunes épouses ;
Ngnie Kamga (administrateur civil et fin danseur, il est l’initiateur de la semaine annuelle de fierté « msem » des Bandjouns) : il avait environ 60 épouses, dont les veuves de son frère Fotue Kamga ;
actuellement Djomo Kamga Honore (ingénieur des polymères) : il s’attelle à reconstruire le patrimoine détruit par un incendie juste après son accès au trône ; en plus des nouvelles épouses, il a la responsabilité de prendre les jeunes veuves de ses prédécesseurs en signe de continuité).
Les habitations
Les habitations des notables ont des toits pointus, le nombre de pointes dépend de la hiérarchie.
Le musée
Le chef possède un grand nombre d’objets d’art ayant appartenu à ses ancêtres :
calebasses et statues ornées de perles
bijoux et statuettes en ivoire
masques
chapeaux de danse: le plus grand qui est porté uniquement par le chef lors de la grande fête annuelle pèse 25kg et il le porte durant presque toute la danse d’exhibition ou Tso, soit à peu près deux tours de la place du marche Dzemto. Il est aidé par les serviteurs, qui portent aussi ses queues de cheval, alors que les autres notables sont aides dans le transport de leurs chapeaux chacun par un fils.
tableaux, meubles (dont des trônes)
trophées de chasse
Looba il est là bas !!
0bandjoun case nemo Ouest Cameroun

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